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Précédé d’une promotion catastrophique, Terminator Genisys débarque sur les écrans avec la volonté d’apporter du nouveau à une saga vieille de 31 ans. Au delà du ratage prévisible, le film confirme à nouveau l’impasse des studios à revigorer des franchises déjà fragiles.

En juin 2011, Megan Ellison, directrice d’Annapurna Pictures (Spring Breakers, Zero Dark Thirty), rachète les droits de la franchise Terminator pour 20 millions de dollars dans une vente aux enchères. Cette dernière confie à son frère David, directeur de Skydance Productions (Mission : Impossible – Protocole fantôme), la confection d’une nouvelle trilogie, tout en gardant un statut de productrice exécutive. Patrick Lussier (Dracula 2001, Hell Driver) est chargé du scénario. Sous l’impulsion de Megan, James Cameron est sollicité pour conseiller l’équipe sur ce nouveau projet. Ce dernier suggère l’idée d’un T-800 à la peau synthétique vieillissante, et l’aide de sa collaboratrice Laeta Kalogridis. La scénariste de Shutter Island se charge des réécritures. Justin Lin doit réaliser le film, mais le tournage de Fast & Furious 6 l’en empêche. Ang Lee, Rian Johnson et Denis Villeneuve sont aussi envisagés. Brett Ratner est sollicité mais préfère se rabattre sur Hercule. C’est finalement Alan Taylor qui hérite de la réalisation.

Le cinéaste retrouve son chef opérateur Kramer Morgenthau, s’entoure du chef décorateur Neil Spisak (Heat, Spider-Man) et du monteur Roger Barton (Le territoire des loups, Speed Racer). Afin de respecter la tradition, l’ancien Stan Winston Studio rebaptisé Legacy Effects, se charge des effets de maquillages et d’animatroniques. Les effets visuels sont confiés à la société britannique Double Négative, au détriment d’ILM relégué au second plan. Pour le rôle de John Connor, Tom Hardy est le premier choix de la production, avant que Jason Clarke hérite du rôle. Brie Larson et Margot Robbie passent des auditions pour incarner Sarah Connor, mais c’est Emilia Clarke, avec qui Taylor a collaboré sur Games of Thrones, qui succède à Linda Hamilton. De nombreux comédiens tels que Garrett Hedlund, Zac Efron, Taylor Kitsch ou Nicolas Hoult sont envisagés pour Kyle Reese, avant que Jai Courtney décroche le rôle. Robert Patrick refuse de rejouer le T -1000, qui sera attribué au coréen Lee Byung-hun. J.K. Simmons, Matt Smith et Courtney B. Vance rejoignent le casting, aux côtés d’Arnold Schwarzenegger de nouveau en tête d’affiche. Terminator Genisys débute quelques instants avant les évènements de Terminator.

Durant la guerre contre les machines, plus précisément lors de l’assaut final que mène la résistance contre le siège de Skynet. Une introduction qui propose un enjeu, véritable contresens avec la mythologie mise en place par James Cameron et Gale Anne Hurd. L’envoi d’un T-800 dans le passé est l’ultime tentative de Skynet pour remporter la guerre, alors qu’une grande partie de la fascination pour la saga reposait sur l’incertitude de l’issue du conflit. Pour ne rien arranger, le sauvetage d’un Kyle Reese enfant par John Connor est contradictoire avec Terminator renaissance. Le film grille d’avance l’un de ses futurs rebondissements, lorsque qu’Alex (Matt Smith) piège John Connor sous le regard impuissant de Kyle Reese, prisonnier de son déplacement temporel. Un enjeu et des situations contradictoires, qui vont contaminer le reste du métrage. Le film se poursuit sur une relecture du premier acte du long métrage de 1984 : rencontre du T-800 avec les punks, fuite de Kyle Reese dans le centre commercial… . et enchaine sur de nouvelles péripéties portant atteinte à la singularité de l’univers. Notamment à travers la caractérisation des personnages.

À l’origine Sarah Connor était une serveuse qui se retrouvait, malgré elle, ultime espoir de l’humanité. Une personne ordinaire confrontée à une situation extraordinaire. En en faisant une personne consciente de sa destinée, entrainée au combat depuis son enfance par un Terminator surnommé Papy, on en perd l’essence. Malgré toute sa bonne volonté, Emilia Clarke peine grandement à convaincre, malmenée par la caractérisation précipitée et son apparence enfantine. Kyle Reese n’est pas épargné. Devenu un second couteau horripilant, il se dispute régulièrement avec Sarah, jusqu’à sombrer dans le ridicule. À l’instar de ses précédentes prestations dans Divergente et Die Hard : Belle journée pour mourir, Jai Courtney se montre incapable de véhiculer le moindre charisme ou émotion. Toute la force de la romance reposait sur son caractère éphémère et profondément tragique. Si Terminator Genisys tente d’introduire une thématique sur le choix de la destinée de Sarah Connor, elle n’est jamais approfondie, laissant place à des scènes qui auraient d’avantage leur place dans un teen movie que dans une science fiction apocalyptique. Quant à Arnold Schwarzenegger, relégué au second plan, il livre une prestation pathétique tentant de renouer avec celle du Jugement dernier. Le voir avec un sourire forcé et dire « Je suis vieux, mais pas obsolète », alors qu’il est doublé numériquement dans pratiquement toutes les scènes d’actions, ridiculise totalement son personnage.

Alors que le sentiment de terreur venait du caractère indestructible du T-800 et du T-1000, ces derniers sont expédiés au bout d’une heure, annihilant leur pouvoir d’évocation. Tout comme le reboot de Star Trek par J. J. Abrams, le film d’Alan Taylor crée une nouvelle timeline qui annule l’existence des précédentes suites. Une donnée qui va modifier la destinée de certains personnages apparus dans la saga. Le chercheur Miles Dyson (Courtney B. Vance) est toujours en vie, désormais à la tête de Cyberdyne Systems aux côtés de son fils. Le long métrage multiplie les paradoxes temporels et les incohérences narratives, qu’il tente de crédibiliser aux détours d’explications absurdes. La deuxième partie, située en 2017, devient un aveu d’échec. La présence de l’application Genisys et d’un John Connor contaminé par Skynet montre la volonté d’aborder des thématiques contemporaines comme l’omniprésence des réseaux sociaux ou le transhumanisme. Malheureusement ces données ne seront jamais traitées. À l’instar de Jurassic World, Terminator Genisys multiplie le fan service jusqu’à l’écœurement, reprenant quantité de scènes et de dialogues aux deux long métrages de James Cameron. Y compris à l’attraction T2 3-D, lorsque la tête du T 800 est projetée en l’air vers le spectateur.

À l’exception de ce recyclage vain empreint d’une nostalgie mortifère, Alan Taylor démontre après Thor : Le monde des ténèbres, qu’il est un cinéaste limité par son découpage télévisuel. Soucieux d’être au goût du jour, le film propose de nombreuses pistes narratives destinées à être expliquées ultérieurement. Nous n’en saurons pas plus sur l’arrivée du T-800 durant l’enfance de Sarah Connor, sur celle du T-1000 en 1984, sur l’identité de Skynet ou les flashbacks de Kyle Reese. Le coup de grâce viendra d’une scène post générique qui voit l’entité Genisys/Skynet devenir une menace similaire à Thanos, dans l’univers Marvel. Du studio de Kevin Feige, le film reprend l’humour désacralisateur qui a fait le succès de ses productions, avec une telle maladresse que le rire involontaire n’est jamais très loin. Fichage des protagonistes sur fond de Bad Boys, politesse extrême d’un Terminator qui se retrouve à faire la boule de bowling sur le pont de San Francisco, à utiliser un ours en peluche pour passer inaperçu à l’hôpital. Autant d’éléments qui finissent par desservir totalement l’univers dépeint, et le ridiculiser définitivement.

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En résumé

À l’instar de Jurassic World, Terminator Genisys, s’impose comme une nouvelle étape dans la destruction d’icônes de la pop culture. Synthèse du pire de la production cinématographique contemporaine, le film échoue lamentablement à redorer le blason de la franchise. Un naufrage artistique qui détruit toute l’aura de la saga initiée par James Cameron, et place désormais la franchise dans la série Z à gros budget. Une triste destinée pour ce qui fut l’un des plus beaux mythes cinématographiques de ces trente dernières années.
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